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poésie

  • Epitaphe

    Je tombe sur l'épitaphe de Mathurin Régnier , un poète de la Renaissance, plus très connu, né à Chartres en 1573 et décédé en 1613 .

      " J'ai vécu sans nul pensement,
    Me laissant aller doucement
    A la bonne loi naturelle,
    Et si m'étonne fort pourquoi
    La mort daigna songer à moi,
    Qui n'ai daigné penser à elle."

     

    C'est assez bien tourné et teinté d'un bel humour surtout pour l'ecclésiastique qu'il était .

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    En 1596, alors qu'il se trouve à Paris, il devient un des poètes attitrés de Henri IV et chante dans ses vers la beauté de Gabrielle d'Estrées, la maîtresse du Roi .

     

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    De celle la, il faudra que je vous reparle, elle mérite plus d'un billet elle et aussi sa soeur la duchesse de Villars .
    Vous voyez qui c'est ?
    mais si ! c'est sa soeur, la dame qui lui pince le téton  dans ce fameux tableau de l'Ecole française , peint vers 1594.:
     
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     Revenons à ce bon Mathurin Régnier.

    Il fut nommé chanoine de la cathédrale de Chartres en 1609 ce qui ne l'empêchait pas de mener bonne vie et bonne chère, fréquentant les cabarets dont la célèbre taverne de la Pomme de Pin et appréciant fort les plaisirs de l'amour.

    S'en étonnera t-on? il fut plusieurs années le secrétaire particulier du Cardinal de ...Joyeuse! 

     Pour autant, il fut le premier poète satirique de langue française et, dit on, un latiniste distingué, grand lecteur des auteurs de son temps, de Montaigne qu'il admirait , de Rabelais et des auteurs de la Pléïade alors qu'il combattit Malherbe dont il détestait la raideur poétique.

    Ses oeuvres les plus connues sont les  19 Satires qu'il écrivit de 1608 à 1613 .

    En voici quelques bribes:

    ..."En forme d'échiquier les plats rangés sur table
    N'avaient ni le maintien ni la grâce accostable
    Et bien que nos dîneurs mangeassent en sergents,

    La viande pourtant ne priait point les gens..."
     
     Si ça vous dit, lancez vous, ça vous changera de vos gazettes ou des manifestes des candidats aux municipales...

     Outre ses Satires, il écrivit, pour Henri IV en particulier des Elégies

     C'est lui qui disait aussi :

    " Estimez vos amants selon le revenu."

    ou encore : " ...car c'est honte de vivre et de n'être amoureux..."

    et même : "le sage sait se vendre où la sotte se donne..."

    mais , mieux : " nous sommes du bonheur de nous mêmes artisans et fabriquons nos jours ou fâcheux ou plaisants "... 

     Sa popularité ne se démentit guère jusqu'au 19ème siècle; Alfred de Musset lui rendit d'ailleurs un bel hommage dans son poème  "Sur la Paresse "

     

             « Oui, j’écris rarement, et me plais de le faire.         
            « Non pas que la paresse en moi soit ordinaire,         
            « Mais, sitôt que je prends la plume à ce dessein,         
            « Je crois prendre en galère une rame à la main. »        
             Qui croyez-vous, mon cher, qui parle de la sorte ?         
             C’est Alfred, direz-vous, ou le diable m’emporte !         
             Non, ami. Plût à Dieu que j’eusse dit si bien,          
            Et si net, et si court, pourquoi je ne dis rien !        
            L’esprit mâle et hautain dont la sobre pensée          
            Fut dans ces rudes vers librement cadencée       
            (Otez votre chapeau),   c’est Mathurin Regnier,        
           De l’immortel Molière immortel devancier,         
            Qui ploya notre langue, et dans sa cire molle         
            Sut pétrir et dresser la romaine hyperbole ;         
            Premier maître jadis sous lequel j’écrivis,          
            Alors que du voisin je prenais les avis,        
            Et qui me fut montré, dans l’âge où tout s’ignore,         
             Par de plus fiers que moi qui l’imitent encore ;"         
             .........................................          

     Allez, encore un effort, je vous inflige quelques vers de la Satire X et puis vous laisse en paix:

     Ô Muse ! je t'invoque : emmielle-moi le bec,
    Et bandes de tes mains les nerfs de ton rebec.
    Laisse moy là Phoebus chercher son avanture,
    Laisse moy son b mol, prend la clef de nature,
    Et vien, simple, sans fard, nue et sans ornement,
    Pour accorder ma flute avec ton instrument.

     

    J'aime assez l'accord de la flute avec l'instrument ...quand je vous disais que le bon Mathurin avait cotôyé le cardinal de Joyeuse et fréquenté la taverne de la Pomme de Pin chère à François Villon ....et à Georges Brassens

  • Rimes gauloises

    Ce que j'aime au printemps je te veux dire mesme :
    J'aime à flairer la rose, et l'oeillet, et le thym;
    J'aime à faire des vers et me lever matin
    Pour, au chant des oiseaux, chanter celle que j'aime,


    En été, dans un val, quand le chaud est extresme,
    J'aime à baiser sa bouche et toucher son tetin;
    Et, sans faire autre effet, faire un petit festin,
    Non de chair, mais de fruit, de fraises et de cresme:


    Quand l'automne s'approche et le froid vient vers nous.
    J'aime avec la chastaigne avoir le bon vin doux
    Et, assis près du feu, faire nue chère lie.


    En hiver, je ne puis sortir de la maison
    Si n'est au soir masqué; mais en toute saison,
    J'aime fort à coucher dans les bras de ma mie.


    Olivier de Magny

     
    Originaire du Sud ouest - il est né en 1519 à Cahors dans le Quercy - et amoureux, plus tard, de la Belle Cordière - la lyonnaise Louise Labbé -  voilà de bonnes raisons de vous mettre en bouche ces vers savoureux d'Olivier de Magny.
    Il fut le contemporain de Joachim du Bellay ( "Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage"...)  et de Pierre de Ronsard ( celui de "Mignonne allons voir si la rose ...." ) et mourut vers 1560. Ses poèmes les plus connus, principalement sous forme de sonnets, sont contenus dans ses recueils " Les Amours" et "les Soupirs ".
     
     
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    Ses amours avec Louise Labbé sont restés dans la chronique; il ne fut pas le seul aimé de la Belle Cordière et la fin de leur liaison ne laissa pas de lui meurtrir le coeur .
     C'est en  évoquant leurs amours , que Louis Aragon écrivit ces vers légers et tendres :
     
    Je l'imagine, elle a les yeux noisettes
    Je les aurais pour moi bleus préférés
    Mais ses cheveux sont blonds comme vous êtes
    O mes cheveux mordorés et dorés
     

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    J'ai déjà évoqué la Belle Cordière dans un billet précédent; laissons la  ce soir sur ces vers brûlants
     Je vis, je meurs: je me brûle et me noie, 
     J'ai chaud extrême en endurant froidure; 
     La vie m'est et trop molle et trop dure, 
     J'ai grands ennuis entremélés de joie. 
       
     Tout en un coup je ris et je larmoie, 
     Et en plaisir maint grief tourment j'endure, 
     Mon bien s'en va, et à jamais il dure, 
     Tout en un coup je sèche et je verdoie. 
       
     Ainsi Amour inconstamment me mène 
     Et, quand je pense avoir plus de douleur, 
     Sans y penser je me trouve hors de peine. 
       
     Puis, quand je crois ma joie être certaine, 
     Et être en haut de mon désiré heur, 
     Il me remet en mon premier malheur.