Rousseau, un peu
Allez , pour vous sortir des miasmes de la politique , un peu de fantaisie empruntée à Rousseau qui excellait aussi dans des petits épigrammes , de nos jours , hélas fort oubliés et, je gage, jamais proposés dans les récitations du collège:
Epigramme
Un moine ayant (c'était un sous prieur)
D'une nonnain vérifier le sexe
Las d'encenser le Temple antérieur
Voulut aussi visiter son annexe.
O vanité ! dit la nonne perplexe
Qu'en son état l'homme se connait mal !
Que vers le bien sa route est circonflexe !
Ub sous prieur trancher du Cardinal !
Epigramme
Qui fait l'enfant dans l'amoureux débat?
Disait Agnès à sa dame prudente.
Est ce celui qui sous l'autre s'abat?
Ou bien l'agent qui dessus instrumente?
La dame alors lui dit: Pauvre innocente,
L'enfant se fait par ceux qui sont dessous.
Dieu soit béni, répliqua la servante,
J'en ai fait un à Monsieur votre époux.
illustrations Raymond Lep -éd. des Gémeaux - Paris
Vous avez bien lu, Rousseau avait la plume verte !
Et vous ne le connaissiez pas sous ce jour , n'est ce pas ...et pour cause puisqu'il s'agit de son homonyme , Jean Baptiste Rousseau ( 1670-1741), poète et dramaturge, considéré de son temps comme "le prince des poètes lyriques" mais tombé assez vite dans les oubliettes de la littérature .
Sainte Beuve nen pensait pas grand bien ; s'il convient que dans ses épigrammes il montrait un réel talent , il qualifiait ses poésiees lyriques de "belles mécaniques glacées , qui tenten de dissimuler leur vacuité sous l'abus de la mythologie et la pompe d'une réthorique aussi convenue que creuse ".
C'est envoyé !
JB Rousseau était un personnage ambivalent : il s'est fait connaitre très tôt dans le grand monde par des cantates et des odes religieuses mais rédigeait en secret et diffusait dans des cercles très privés de la noblesse des épigrammes licencieuses .Et pourtant, il fut à ses débuts sous la protection de Boileau
Son esprit vindicatif , son goût pour les pamphlets injurieux lui valurent d'être banni du royaume à 42 ans ; il finit ses jours à Bruxelles.
En définitive , la littérature a retenu de lui l'ode que Lefranc de Pompignan () lui dédia à sa mort , une ode fort bien tournée , sans doute le seul chef d'oeuvre de ce pauvre Pompignan, auteur dont Voltaire se moquât férocement :
" César n’a point d’asile où son ombre repose,
Et l’ami Pompignan pense être quelque chose."
Mais de Lefranc , je vous reparlerai en passant par Pompignan.,