L'Epiphanie est une manifestation de Dieu aux hommes; et la visite des Rois mages au Christ né à Béthleem est célébré comme une épiphanie.
La date de l’Epiphanie a été fixée au 6 janvier c'est-à-dire qu’elle marque la fin d’un cycle de 12 jours, qui commence à Noël. Il faut d’ailleurs noter que pour les chrétiens d’Orient, ce 6 janvier est la fête principale.
Et, comme pour la nativité ou l'adoration des bergers, les artistes se sont emparés du sujet dès l'apparition des premières formes d'art avec l'avénement du christianisme ; je vous propose un tour d'horizon rapide dans le temps :
Giotto - l'adoration des rois mages (vers 1304) église de l'Arena à Padoue
L’étoile des mages, que l’on peut aussi interpréter comme une comète, reste dans la tradition des Anciens qui voyaient dans chaque manifestation astrale nouvelle, l’annonce d’un évènement important. Et justement, la comète de Halley, très visible en 1301, a été reproduite par Giotto (la trainée orange au dessus de l'étable) qui s'est souvenu de son passage au dessus de l'Italie.
Léonard de Vinci (1452-1519) l'adoration des mages (1481) Les Offices Florence
Tableau inachevé,on ne sait pourquoi; assez étrange, la vierge adossée à un rocher, les ruines d'un palais (celui du roi David dont descendait le Christ ?) , une cavalcade aux interprétations multiples des spécialistes ( la défaite de l'ignorance et de la violence , l'inimitié entre les trois Mages venus de trois régions différentes ...?), la situation de la scène au milieu du tableau avec les lignes de fuite qui conduisent le regard au delà de la sainte Famille...on ne saura sans doute jamais ce qu'à voulu exprimer Vinci et c'est tout l'intérêt de cette oeuvre.
A l’origine les mages sont des astrologues de Perse ou de Babylonie qui étudient les étoiles et qu’on représente habillés à l’orientale comme l'ont fait Dürer ou Jérôme Bosch :
Albrecht Dürer (1471-1528) - l'adoration des rois mages (1504)
Jérôme Bosch - l'adoration des mages (entre 1470 et 1475) Met de New-York
Comme il y a trois présents, l'or, la myrrhe et l'encens, la tradition a fixé leur nombre à trois; on y voit alternativement et c'est selon, le symbôle des trois âges : la jeunesse , la maturité et la vieillesse (cf le tableau de Dûrer) ou des trois continents connus avant les grandes découvertes : Europe, Asie , Afrique ce qui explique d'ailleurs la présence systématique d'un mage de race noire encore que cela n'apparaisse pas toujours dans les représentations sculptées :
Oliveri Piero Paolo - l'adoration des mages (1599) - église Ste Prudence - Rome
Curieusement , un artiste italien du 14ème siècle, Bartolo di Fredi, en a ajouté un quatrième dans une de ses nativités, un importun que je vous laisse le soin de repérer dans le groupe ci dessous :
Bartolo di Fredi (1330-1410) - l'adoration des rois mages - 1380 - pinacothèque de Sienne
...et comme les astrologues n'étaient pas très bien vus, les mages savants sont devenus naturellement des rois puissants aux riches costumes chatoyants de couleurs comme les a peint Mantegna:
Mantegna (1431-1506)-rois-mages-adoration ( entre 1495 et 1050)- fondation Paul Getty
ou nimbés d'or et de brun dans le clair obscur de Rembrandt:
Rembrandt - 1606-1669 - l'adoration des mages (1632) musée de l'Ermitage St Pétersbourg
ou entourés de soldats et en habits d'apparat comme dans ce tableau de Rubens:
Pierre Paul Rubens - L'adoration des Mages-1618 huile sur toile- Musée des Beaux-arts, Lyon
Dans la tradition chrétienne occidentale, on "fête les Rois" et, à cette occasion, on déguste une galette comme cette modeste famille dans l'atmosphère contrite si particulière des toiles de Greuze (1725-1805)
Jean Baptiste Greuze - l'épiphanie - musée Fabre Montpellier
La galette est plutôt une brioche dans le sud et un gâteau de pâte feuilletée dans le nord, réminiscence peut être d'offrandes paîennes à Saturne; le gâteau est partagé entre les convives et celui qui tire l'objet (une pièce d'argent chez les riches autrefois, une fève en porcelaine depuis le milieu du 19ème) est sacré Roi en criant "le roi boit" , occasion naguère de fêtes carnavalesques voire de bacchanales , comme sur les tableaux de Jacob Jordaëns (1593-1678) ; le thème a beaucoup inspiré le peintre , on en connait plusieurs versions: à Vienne, à Kassel, à l'Ermitage de St Petersbourg, au Louvre, à Bruxelles ; je vous fais grâce de toutes, restons en aux trois versions les plus connues de ce truculent coloriste du 17éme flamand :
Jacob Jordaens (1593-1678)- le roi boit (entre 1638 -1640)- le Louvre
Jordaens - le roi boit (1655) - Kunsthistorische museum - Vienne
Jordaens - le roi boit - musée royal des Beaux arts Bruxelles
A notre tour de boire (modérément) à la nouvelle année , boire peu mais bon et moins que le Roi en adressant nos voeux à tous ceux qui nous sont chers, ceux de votre humble serviteur à tous ses lecteurs, lectrices et autres visiteurs .